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Régulation du catabolisme

La dégradation de la vitamine D3 dépend, dans les reins, de la régulation de la CYP24A1. Les apports en phosphates et la PTH modulent l’activité et l’expression de cette enzyme de manière opposée à leur effet sur CYP27B1 (Figure 2). De plus, une étude récente propose une régulation par la calcitonine de l’expression du gène codant CYP24A1 via la voie de signalisation Ras-PKC zêta (protéine kinase C d’isoforme zêta) (Figure 2). Néanmoins, le principal facteur de transcription impliqué dans la régulation du gène codant la 24-hydroxylase est le récepteur « classique » de la vitamine D3, VDR (vitamin D receptor). Cette protéine appartient à la superfamille des récepteurs nucléaires, facteurs de transcription activés par des ligands (hormones ou molécules lipophiles). La 1,25(OH)2D3 stimule la transcription de CYP24A1 via sa fixation sur l’hétérodimère formé par VDR et RXR (retinoic X receptor), le récepteur de l’acide rétinoïque 9-cis, qui reconnaît des séquences spécifiques (séquences VDRE, vitamin D response element) dans le promoteur du gène (Figure 3). Par ailleurs, VDR aurait un rôle direct dans l’inhibition de l’expression de la CYP27B1 dans les reins. Cette répression résulterait de la liaison de l’hétérodimère VDR/RXR à un facteur de transcription de type bHLH (basic helix-loop-helix) capable d’interagir avec un motif consensus appelé « boîte E » présent sur le promoteur de la CYP27B1. Via l’action de VDR, la 1,25(OH)2D3 peut exercer un contrôle sur sa propre synthèse et son propre catabolisme. Un autre récepteur nucléaire, PXR (pregnane X receptor), impliqué dans la régulation du métabolisme des xénobiotiques et des médicaments, permettrait l’induction du gène codant CYP24A1 grâce à son interaction avec les séquences VDRE (Figure 2). Ainsi, les médicaments anti-épileptiques ou anti-convulsifs, activateurs de PXR, de même que les corticostéroïdes, peuvent conduire à une carence en vitamine D. Lorsque ce type de médicament est prescrit à long terme, comme c’est le cas pour les personnes épileptiques ou souffrant d’arthrite, un apport supplémentaire en vitamine D peut s’avérer nécessaire.

Figure 3 : Schéma de la régulation transcriptionelle de l’expression de CYP24A1 par le récepteur de la vitamine D.

La vitamine D active, 1,25(OH)2D3, circule liée à DBP (vitamin D binding protein). 1,25(OH)2D3 pénètre dans la cellule cible et va se lier à son récepteur nucléaire VDR (vitamin D receptor). Le complexe 1,25(OH)2D3/VDR forme un hétérodimère avec RXR (retinoic X receptor) dont le ligand est l’acide rétinoïque 9-cis (9CRA). L’heterodimère VDR/RXR se lie à des séquences spécifiques (séquences VDRE, vitamin D response element) situées en amont du gène de la CYP24A1. Il s’ensuit une activation (+) de la transcription du gène de CYP24A1.

Rôles biologiques de la vitamine D

La 1,25(OH)2D3 est une hormone hypercalcémiante. Elle agit essentiellement à trois niveaux. (1) Intestinal : elle permet une absorption intestinale accrue du calcium alimentaire et secondairement celle des phosphates. Deux sites d’action sont reconnus. Sur la bordure en brosse des cellules intestinales, cette hormone augmente la synthèse du transporteur de calcium (CaT1) qui est le mode d’action majeur pour l’absorption intestinale du calcium. Dans les cellules intestinales, elle augmente la synthèse de la protéine calbindine qui favorise le transport du calcium contre un gradient de concentration entre les cellules intestinales et le plasma, entraînant ainsi la diffusion passive des ions phosphates. (2) Osseux : en réponse à une hypocalcémie, la vitamine D active de façon directe la résorption osseuse en favorisant la différenciation et l’activation des cellules souches mésenchymateuses de l’os en ostéoclastes. (3) Rénal : l’hormone augmente la réabsorption tubulaire du calcium par action directe sur le canal épithélial calcique (ECaC). Son effet stimulant sur la réabsorption tubulaire des phosphates est secondaire à l’inhibition de la sécrétion de PTH produite par l’hypercalcémie associée à l’administration de vitamine D. Elle accélère également le transport du calcium et des phosphates par un mécanisme dépendant de la PTH.

L’action de la 1,25(OH)2D3 s’exerce via deux voies différentes. La plus connue implique la liaison de 1,25(OH)2D3 à VDR qui induit une activation ou une répression de la transcription de gènes cibles, comme décrit ci-dessus. Des études plus récentes suggèrent l’existence d’une voie dite « non génomique », plus rapide, faisant intervenir un VDR membranaire capable d’activer la voie de transduction impliquant la protéine kinase C et capable de modifier le métabolisme des phospho-inositides et la distribution intracellulaire du calcium.

À côté de son rôle bien établi dans la régulation de l’homéostasie phosphocalcique, la vitamine D possède d’autres fonctions physiologiques (Figure 4) telles que des effets immuno-modulateurs ainsi qu’une implication dans le contrôle de la différenciation de nombreux types cellulaires et l’inhibition de leur prolifération. La mise en évidence de ces nouvelles propriétés a initié de nombreuses études concernant l’utilisation de cette hormone et de ses analogues moins hypercalcémiants dans le traitement des maladies hyperprolifératives (cancers) et dans celui des maladies auto-immunes (diabète de type 1). Parmi les analogues de la vitamine D, on peut citer, par exemple, le calcipotriène utilisé dans le traitement du psoriasis. Enfin, il faut également noter que la 24,25(OH)2D3, un métabolite, aurait un rôle dans la croissance, le développement et la réparation des os.

Figure 4 : Rôles physiologiques de la vitamine D3.

La forme active de la vitamine D3, 1,25(OH)2D3 (1,25-dihydroxyvitamine D3), liée à son récepteur nucléaire VDR est impliquée dans divers processus physiologiques au sein de l’organisme (pour plus de détails, se référer au texte).

Maladies associées au métabolisme de la vitamine D

Les maladies liées au statut vitaminique D sont très souvent le résultat d’une carence en vitamine D. Cette carence entraîne un rachitisme chez le jeune en croissance. Chez l’adulte, un trouble de la minéralisation osseuse, appelé ostéomalacie, peut entraîner une hypersécrétion de PTH. Chez la personne âgée, cette carence constitue un terrain favorable à l’ostéoporose, maladie caractérisée par une masse minérale basse et des altérations de la microarchitecture osseuse. Les fractures sont la complication la plus fréquente et s’accompagnent d’une augmentation de la morbidité et de la mortalité. Il est intéressant de noter que l’ostéomalacie peut résulter de la prise prolongée de médicaments tels que le phénobarbital, qui après activation du récepteur nucléaire PXR, induit l’expression de CYP24A1, ce qui conduit à la dégradation incontrôlée de la vitamine D active entraînant une altération de l’homéostasie phosphocalcique.

Il existe également des maladies héréditaires du métabolisme de la vitamine D à transmission autosomique récessive. Le rachitisme pseudo-carentiel de type I résulte d’une anomalie de l’expression du gène codant CYP27B1. Le taux de 25(OH)D3 est normal chez les individus atteints du rachitisme pseudo-carentiel de type I alors que le taux de 1,25(OH)2D3 s’effondre. Des déformations et douleurs osseuses, un retard de croissance et une myasthénie caractérisent la maladie. L’administration de 1,25(OH)2D3 est nécessaire pendant toute la vie des personnes atteintes de cette affection. À l’inverse, le rachitisme pseudo-carentiel de type II résulte d’une anomalie de l’expression du gène codant VDR. Il se caractérise donc par une résistance des organes cibles à l’action de 1,25(OH)2D3 dont le taux est élevé. Ce rachitisme pseudo-carentiel de type II se manifeste par un tableau de rachitisme sévère et précoce, associé à une alopécie dans 80 % des cas. Le traitement consiste en l’administration de doses massives de tous les dérivés de la vitamine D3 et de calcium.

À côté de ces états de carence, de déficit ou d’insuffisance en vitamine D, un apport excessif (intoxication) peut entraîner une hypervitaminose qui provoque une hypercalcémie par augmentation de l’absorption intestinale et de la résorption osseuse. Cette hypercalcémie peut conduire à des atteintes rénales (lithiases et néphrocalcinoses). Les cas d’hypervitaminose endogène sont rares sauf dans certaines maladies telles que les granulomatoses qui se caractérisent par une production non contrôlée de 1,25(OH)2D3.

Conclusions

La vitamine D est connue depuis longtemps pour son rôle primordial dans le contrôle de l’homéostasie phosphocalcique et dans la minéralisation osseuse. La mise en évidence plus récente de son rôle physiologique dans l’immunité, la différenciation cellulaire, la prolifération et la neuroprotection justifie un intérêt grandissant pour cette hormone.

Au cours de ces dernières années, l’étude du métabolisme de la vitamine D, de son mécanisme d’action et de ses « nouveaux » tissus cibles a été abordée, notamment, par l’utilisation d’outils de biologie cellulaire et moléculaire. Les données obtenues ont mis en évidence les principaux acteurs de ce métabolisme : enzymes de type cytochromes P450 (CYP27A1, CYP2R1, CYP27B1 et CYP24A1) et récepteur nucléaire VDR qui jouent un rôle majeur dans le contrôle du métabolisme de la vitamine D. De façon plus surprenante, la production de vitamine D a pu être mise en évidence dans d’autres tissus (placenta, cerveau, prostate, peau). Si l’existence de cette synthèse locale suggère une action autocrine et/ou paracrine de cette hormone, les cibles moléculaires et surtout les fonctions physiologiques d’une telle synthèse sont encore en cours d’étude.

Un manque de vitamine D entraîne un rachitisme chez l’enfant ainsi qu’une exacerbation de l’ostéoporose et le développement d’une ostéomalacie chez l’adulte. L’allongement de la durée de vie et l’incidence des fractures provoquées par l’ostéoporose ont fait de cette affection un problème de santé publique très actuel. De plus, une grande partie de la recherche sur la vitamine D a trait au développement de l’utilisation du 1,25(OH)2D3 comme agent prévenant ou retardant la survenue de certaines maladies auto-immunes (diabète de type 1) ou prolifératives (cancers solides, leucémie, psoriasis). Une meilleure compréhension du rôle des CYP impliquées dans le métabolisme de la vitamine D ainsi que de celui des facteurs régulant leur expression comme les récepteurs nucléaires et les co-facteurs associés, constitue un des défis à résoudre afin de mieux apprécier le rôle de la vitamine D dans les conditions physiologiques normales ou dans les maladies associées.

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